C DIM 05 - J'ai Jésus dans mon bateau !

 


Décidément, il n’est pas rancunier, Simon-Pierre ! Jésus vient de guérir sa belle-mère qui était alitée avec de la fièvre, et juste après, voilà ce Jésus qui vient squatter sa barque de pêcheur en l’empêchant de faire son travail... !

Pierre, non seulement va le laisser faire, mais en plus il va obéir à Jésus qui lui commande d’aller au large et de jeter ses filets. Et il n’en revient pas, Pierre, de la prise extraordinaire et inattendue qu’il va faire !

C’est ainsi quand on laisse le Christ s’inviter dans nos vies. Tout peut alors arriver.

La barque de Pierre, c’était sa vie. Jésus s’invite, il embarque dans la vie de Simon-Pierre, et Simon-Pierre laisse tout pour s’embarquer avec Jésus. Et une fois qu’il a décidé de laisser le gouvernail à Jésus, alors que c’était lui le patron de la barque, il a vu quelle surabondance cela apportait de travailler avec Jésus, sous ses ordres.

Il a vu, il a été émerveillé, et en même temps il a pris conscience de sa petitesse, il a bazardé son orgueil de patron chalutier aguerri : « éloigne-toi de moi, Seigneur, car je suis un homme pécheur ! » 
Il y a le double émerveillement de voir Pierre s'entendre demander par Jésus d'embarquer dans sa barque pour mieux s'adresser à la foule trop nombreuse puis «l'émerveillement-étonnement» de voir la surabondance de poissons alors qu'il n'avait rien pris de la nuit.  

Mais il y a un autre émerveillement moins évident pour ceux qui entendent ce texte de Luc sans l'écouter, sans le prier (vous avez beau entendre mais vous ne comprenez pas Mt 13, 14): Jésus s'était embarqué dans la barque de Simon. Il s'était invité dans la vie de Simon (souvenez-vous, la barque était sa vie) MAIS voilà que ce même Simon laisse tout pour s'embarquer avec Jésus.  Jésus s'est embarqué dans la barque de Simon et Simon s'est embarqué dans la barque de Jésus en lâchant son affaire parce qu'il a vu la surabondance qu'il offrait.



Que s'est-il passé pour qu'il y ait un tel renversement de situationSimon a écouté Jésus. Il a écouté Jésus qui lui demandait de prendre du large pour qu'il s'adresse à la foule. Il a écouté Jésus qui lui demandait de tout quitter, de jeter les filets, d'abandonner son métier de pêcheur pour le suivre. Écouter, c'est une porte d'embarquement.

Et Simon qui deviendra Pierre, a entrepris une aventure, celle d'engendrer un projet d'une terre neuve, d'une terre humaine en surabondance de beauté. Et la construction de cette terre se poursuit encore de nos jours par chacun d'entre nous. Émerveillons-nous de voir des hommes et des femmes, des chrétiens réaliser que Jésus s'est embarqué dans la barque de leur vie et qu'ils répondent comme Isaïe : Moi, je serai ton messager, envoi-moi.

Comme le prophète dans la 1è lecture, comme Paul qui ne se sent pas digne d'être appelé apôtre parce qu'il a persécuté l'Église (1 Co 15, 9), nous aussi éprouvons nos limites devant une tâche si grande. Saint Augustin fait dire à Jésus, et cela devrait nous rassurer, nous revitaliser : « donne-moi cet homme [donne-moi ta vie]. Lorsque je l'aurai rempli [de ma présence], on verra clairement que c'est moi seul qui agis. »

Un autre grand priant, saint Cassien, exprimait que Dieu n'a pas besoin de nos forces mais de nos faiblesses. Le livre des Proverbes écrit quelque chose de très beau : « de la communion de nos faiblesses nait une cité fortifiée et puissante » (Pr 18, 9). L'émerveillement des émerveillements, c'est de réaliser que malgré nos faiblesses qui sont des dons précieux plutôt que des problèmes, cet appel à jeter le filet de la Bonne Nouvelle se réalise aujourd'hui en vous et en moi.
  


Dans un livre récent sur comment Faire bouger l'Église catholique, l'auteur de 98 ans, le jésuite Joseph Moingt, affirme que cette mission [de faire bouger l'Église] incombe impérativement, en fin de compte, au laïcat engagé dans la vie et les affaires de ce monde (p.15).  Dans la situation présente de notre société, massivement incroyante et détachée de la pratique religieuse et de l’Église, nous devons, ensemble, être prêts à nous expliquer devant tous ceux qui nous demandent de rendre compte de l’espérance qui est en nous; faites-le avec douceur et respect dit Pierre le pêcheur (1 P 3, 15-16).

Ce dont notre monde a le plus besoin, c'est de voir se réaliser un projet de société que Jésus lui-même a suscité , ce projet qui l'a conduit à la mort. Projet de donner de la dignité à tous les humains. À tous ces «indignés» que l'on chasse des places publiques. Jésus n'a pas été le fondateur d'une nouvelle religion qui serait à côté de la vie. Il ne nous a laissé aucune morale à prôner. Il a constamment contesté ceux qui vivaient installés dans une pratique toute extérieure de la religion. Il a suscité une nouvelle manière de vivre : le sabbat est fait pour nous et non nous pour le sabbat.

La question est simple : si nous ne jetons pas dans nos milieux la Parole, si nous n'ensemençons pas dans les coeurs une bonne nouvelle, qui le fera ? Paraphrasant saint Jacques (2, 17), je nous dis: une foi qui ne jette pas les filets est une foi morte.

 L’Evangile est là, frères et sœurs, pour toujours nous relancer dans la foi, ranimer l’espérance et l’audace quand elles sont défaillantes : La pêche miraculeuse, ce n’est pas un truc du passé, c’est une promesse d’avenir, des centaines et des milliers de pêches miraculeuses pour nous et pour l’Eglise si elle veut bien prendre le large au vent de l’Esprit et oser lancer les filets où le Seigneur l’ordonne !


Frères et sœurs, quelques questions pour terminer : -Vous souvenez-vous de quand vous avez laissé Jésus monter dans la barque de votre vie pour la première fois ? Et quelles autres fois ?

-Quand ai-je eu l’envie – l’audace d’oser prendre un risque pour le Seigneur ?

-M’arrive-t-il de rêver d’avancer au large, d’entreprendre des choses nouvelles et de réaliser ce que je suis vraiment ?

Oscar Wilde a écrit : « Les folies sont les seules choses que l’on ne regrette jamais. »

AMEN !

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