C AVENT 04 - Echographie spirituelle
Peut-être
que les plus âgés d’entre nous ne verront pas de quoi on parle, mais
aujourd’hui dans notre monde hyperconnecté et technologique, il devient
difficile de passer à côté de certaines réalités.
J’ai une
magnifique petite imprimante laser qui ne m’a pas coûté très cher. Elle a une
caractéristique spéciale : il n’y a pas de câble pour la raccorder à mon
ordinateur. Tout se fait par WI-FI. Comme ça, à travers les airs… !
Extraordinaire !
Seulement,
il y a quelques jours, je voulais imprimer une simple feuille avec les
rendez-vous médicaux de mon papa, je lance l’impression, clic, …rien !
Trois ou quatre essais encore, sans succès. Je vais voir dans les
paramètres : évidemment, mon ordi s’était déconnecté de lui-même du signal
WI-FI. Pas d’internet, pas de copie ! Fallait tout relancer… Ah, le
progrès !
Beaucoup
d’entre nous, surtout les jeunes, ont déjà fait cette expérience :
connecter deux ou plusieurs appareils entre eux : téléphone, montre,
ordinateur, machine à laver, éclairage, volets électriques, que sais-je encore,
via l’internet, est aujourd’hui chose courante. Mais pas toujours évidente
quand le diable s’en mêle avec ses interférences, ses pannes de réseau…
Le
Bluetooth, par exemple, c’est extraordinaire ! Pouvoir écouter de la
musique en faisant son jogging le matin ou recevoir des appels téléphoniques
tout en conduisant sa voiture sans risque, c’est quand même fantastique !
– à condition de rester concentré sur son environnement. Et que l’appairage
fonctionne.
En tout
cas, il y en a deux qui n’ont pas eu besoin eux du WI-FI ni du Bluetooth pour
communiquer entre eux,
malgré la distance opaque que constituait le placenta de leurs mamans : ce
sont les deux cousins Jésus et Jean-Baptiste !
« Quand
Élisabeth entendit la salutation de Marie, l’enfant tressaillit en elle. Alors,
Élisabeth fut remplie de l’Esprit Saint… »
Vous vous
rendez compte ? Quelle connexion ! La voix de Marie arrive aux
oreilles d’Elisabeth ; le bébé qu’elle attend entend cette voix ; il
sent une présence divine – celle de Jésus tout près de lui ; et hop !
il tressaille (bondit) dans le ventre de sa maman…
Toutes les
mamans enceintes ont bien sûr fait cette expérience, d’un petit chenapan dans
leur ventre se manifestant soudain par des mouvements ou parfois même des coups
de pied – ce qui a pour effet d’attendrir la maman comme le papa :
« allo, allo, ici Apollo, Houston est-ce que vous m’entendez ? »
Mais là,
dans cette rencontre et cet échange entre Marie, Elisabeth, Jean et Jésus,
c’est un peu différent : non seulement ils sont quatre, mais tout le
monde, au bout du compte, explose de joie et d’action de grâce : Après la
salutation de Marie, Jean tressaille, Elisabeth exulte sous l’action de
l’Esprit et bénit Marie et son fils, Marie entonne son Magnificat… et
Jésus ? Jésus, qui n’a que quelques jours ou une ou deux semaines, dort
paisiblement comme lorsqu’il sera plus tard dans la barque au milieu de la
tempête… mais il rayonne de l’Esprit-Saint qu’il communique à Jean et de Jean à
Elisabeth… QUELLE CONNECTION !
Vous avez
compris : le réseau ici n’est ni le WI-FI ni le Bluetooth,
mais l’ESPRIT-SAINT. Quel meilleur réseau peut-il exister que celui-là ?
Un réseau absolument fiable et sans défaillances car de nature divine ! Et
en plus, il est accessible à tous, donné gratuitement à notre Baptême… Il est
de toutes les vraies rencontres c’est-à-dire les rencontres spirituelles (« spiritus »,
le souffle de l’Esprit).
Et voilà la
bonne nouvelle de ce dimanche : nous pouvons nous aussi tressaillir comme
Jean-Baptiste, alors que notre véritable naissance se rapproche ! Et
laisser l’Esprit-Saint nous remplir jusqu’au fond de notre être et de notre âme
pour que la Présence du Seigneur nous habite et nous anime de sa joie et de son
souffle, nous pousse en avant – nous fasse SORTIR de nous-mêmes…
Cela demande
peut-être une petite explication. Comment nos rencontres peuvent-elles
devenir spirituelles, et nous faire bondir et tressaillir
intérieurement et même physiquement ?
Petit détour
par l’étymologie : Le verbe tressaillir (tres-salire)
signifie : franchir d’un bond, sauter au-delà, déclencher un mouvement
musculaire sous l’effet d’une émotion, en réaction à un événement, une
sensation qui surprennent. Tressaillir, c’est donc faire un grand bond en
avant, mieux que celui décrété par Mao en 1958-60 !
La visite de
Jésus en Marie é-meut littéralement Jean-Baptiste, c’est-à-dire le met en
mouvement pour le faire aller de l’avant ! Il en est ainsi des visites du
Christ dans notre histoire personnelle : tel événement, telle
lecture, telle rencontre, telle parole nous font tressaillir, c’est-à-dire nous
mettent en mouvement pour aller de l’avant, au lieu de nous
recroqueviller au creux de l’en-ceinte protectrice de nos certitudes ou de nos
indifférences désabusées.
Si ces
événements ou ces rencontres peuvent quelquefois nous surprendre, sont
inattendues, il nous appartient cependant d’y être attentif et réceptif. Comme la
salutation de Marie pour Élisabeth, elles feront office d’échographie
spirituelle pour repérer ce qui bouge en nous : nos projets, nos désirs,
nos attentes. À ce moment-là, en prenant conscience qu’une Présence divine
amoureuse nous enveloppe, il y a comme une lumière intérieure qui éclaire notre
vie et la rend plus compréhensible, et dans un tressaillement, nous nous
découvrons capables de faire un bond, un progrès dans notre vie au-delà de nos
limites actuelles.
Tressaillir, c’est goûter avec étonnement mon
profond accord avec tel paysage, telle vue, avec la Création.
C’est
pleurer inexplicablement à la lecture d’un passage d’un livre qui résonne en
moi.
C’est ne
faire qu’un avec une musique, stupéfait d’y entendre la vérité de mon être.
C’est
éprouver la justesse de mon combat pour la justice, surtout lorsqu’il devient
âpre, compromettant, dangereux.
C’est être
bouleversé devant la souffrance d’autres personnes que je découvre comme des
frères.
C’est
savourer la communion avec l’être aimé.
C’est
déborder de gratitude pour l’ami qui m’écoute ou se confie.
C’est
découvrir violemment que « ça c’est moi », et « ça ce n’est pas moi ».
C’est se
mettre à chanter sans raison dans l’exécution de tâches banales.
C’est
s’arrêter, bouleversé, devant un tableau inconnu.
C’est
entendre une lecture à la messe comme si elle m’était adressée à moi
personnellement, précisément et ne plus pouvoir me détacher de cette parole…
Frères et
sœurs, l’échographie est le moyen très sûr de surveiller une grossesse. Nos
tressaillements intérieurs sont les échographies spirituelles où il nous est
donné de discerner ce qui grandit en nous, ce qui nous anime, afin de nous
hâter vers l’accomplissement de ce que nous portons en nous de plus vrai.
Ces tressaillements-là n’ont rien à voir avec les exaltations pseudo-mystiques
de certains milieux qui recherchent des sensations émotionnelles provoquées artificiellement
dans des sessions soi-disant spirituelles de développement personnel.
Si vous êtes
attentifs à ces échographies spirituelles, alors la naissance à vous-même – le
vrai Noël en somme – ne sera plus très loin…
Et si nous savons accueillir aujourd’hui cette venue du Christ en
nous, nous tressaillirons dès maintenant de cette allégresse promise en
plénitude pour toujours !
AMEN !
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