A AVENT 02 - La carotte ou le bâton ? Non, l'Espérance !

 

Curieux paradoxe dans les textes que nous propose la liturgie aujourd’hui !

D’un côté, la vision du prophète Isaïe, la vision d’un monde de bonheur et d’harmonie, dont nous sentons bien qu’il est inaccessible :
"Le loup habitera avec l’agneau, le léopard se couchera près du chevreau, le veau et le lionceau seront nourris ensemble" ;



Et, de l’autre côté, les paroles menaçantes du prophète Jean-Baptiste :
"Engeance de vipères ! Qui vous a appris à fuir la colère qui vient ? La cognée est au pied de l'arbre, tout arbre qui ne produit pas du fruit va être coupé…"



Alors quoi ? La carotte et le bâton ?  La récompense pour les uns, la punition pour les autres ?
"La paille, il la brûlera au feu qui ne s’éteint pas".



Dans notre éducation catholique, n'avons-nous pas été conditionnés, formés (ou déformés) par ce genre d'injonction  : la carotte ou le bâton, la récompense ou la punition ?

Même Jésus semble s'y mettre parfois :  "Si vous ne pardonnez pas aux hommes, votre Père non plus ne pardonnera pas vos fautes" (Mt6,15).

Alors, j’ai l’impression que c’est un peu comme toujours !
Déjà à l’école : les bonnes notes et les mauvaises notes, les bons points et les mauvais points…
Et puis, ça continue comme ça tout au long de la vie.
Nous sommes sans cesse jugés, jaugés, récompensés, punis…

Ça, c’est notre monde, celui où nous vivons.
Le monde de Dieu ressemblerait-il tant que cela à notre pauvre monde ?
Le monde de Dieu… ou la représentation que nous en avons ?

STOP ! 

On va rembobiner le film, avec notre télécommande mentale, parce que je crois qu'on a loupé quelque chose d'important !  Retour sur saint Paul aux Romains :

"Tout ce qui a été écrit dans les livres saints l'a été pour nous instruire, afin que, grâce à la persévérance et au réconfort des Ecritures, NOUS AYONS L'ESPERANCE !"   VOILà !



La Bible, ce n'est pas un livre de morale, "fais ci, fais pas ça, si t'es sage t'auras une image, si t'es pas sage, gare à toi !"  La bible, l'Evangile, c'est un MESSAGE D'ESPERANCE !

Bien sûr, il y a des paroles difficiles !  Jean-Baptiste, il n'y va pas par le dos de la cuillère quand il invective les pharisiens et les sadducéens : "Engeance de vipères ! Qui vous a appris à fuir la colère (de Dieu) qui vient ?"



 On  aimerait mieux ne pas être à leur place !  Mais cela ne fait-il pas partie de la pédagogie (un peu forte, je vous le concède) - du "style Jean-Baptiste" ? Secouer le prunier pour faire tomber les fruits, c'est un peu sa manière. Mais c'est parce qu'il a une merveilleuse nouvelle d'espérance à annoncer : "Le Royaume des Cieux est tout proche !" 

Dimanche dernier, nous entendions parler d'un monde nouveau, qui est déjà là, qui est commencé, et de l'ancien est en train de disparaître… Voilà le motif d'espérance fantastique qui animent les prophètes et ceux qui veulent bien les entendre !  L'avenir est en marche, et l'avenir, c'est Dieu lui-même : il vient apporter la libération aux opprimés, la consolation à ceux qui pleurent, la justice à ceux qui sont écrasés sous  des lois ou des régimes injustes, la sécurité à ceux qui sont persécutés, la dignité et le respect à ceux qui sont exclus, etc.



Utopie, comme le loup qui habite avec l'agneau ? 

Rêves d'illuminés ou promesses faciles de manipulateurs dangereux ?

Non, car ce monde est en marche. A l'appel des prophètes, ceux d'hier et ceux d'aujourd'hui, des milliers, des millions de personnes apportent leur petite pierre au changement. Cela ne se fait pas sans difficultés ni sans résistances ; l'ancien monde bâti sur le seul profit et la domination, l'exploitation de l'homme, qui tourne tellement mal et provoque tant de souffrances s'accroche… Mais ses jours sont comptés.    "Un nouveau monde est déjà né, ne le voyez vous pas ?"

C'est ça, l'espérance.

...Alors, tous les anciens comportements, les fausses sécurités, les hypocrisies, tout cela doit disparaître ! Tout cela n'a plus cours, plus droit de cité dans le monde nouveau. C'est devenu obsolète. La parole retenue pour cette deuxième semaine de l'Avent est : "Convertissez-vous" . Convertissez-vous, car le Royaume est tout proche, dit Jean le baptiste.


Eh bien, la première tâche, est d'abord de se convertir à l'espérance

Quelle est votre espérance, frères et sœurs ? 

Où en est-elle ?



Sommes-nous désabusés, défaitistes devant l'état du monde, la violence, les injustices chez nous ou ailleurs ?  Tombons-nous dans le cynisme ou dans le syndrome de l'autruche qui veut ne pas voir et préfère se distraire ?

Ou bien jouons-nous le petit jeu des pharisiens qui font semblant de se convertir, qui disent: "nous sommes des fils d'Abraham, des baptisés, des confirmés, des bons chrétiens quoi", mais qui laissent faire et ne se mouillent pas ?

Une conversion, c'est un retournement non pas de veste, mais du cœur : est-ce que j'accepte que mon cœur soit retourné, par ce que je vois, ce que j'entend ?


Se convertir, ce n'est pas réciter le Credo, c'est devenir un homme ou une femme d'espérance, et le manifester : l'espérance est une attitude active, et elle n'existe que pour se communiquer aux autres. Parce que je crois que Dieu est présent et agissant dans ce monde (ce que je découvre en veillant comme c'était suggéré dimanche dernier), parce que je sais qu'il vient à nous - par le pauvre, l'étranger, l'exclu.., je lui prête mes bras et je m'engage dans la dynamique du Royaume :  ce que toute l'année, mais en particulier en cette période de l'Avent je suis invité - provoqué à faire.



Il faut bien un Jean-Baptiste pour cela, pour me réveiller, me secouer…!

"Où est ton espérance ?  Montre-là, convertis-toi (retourne-toi) et porte du fruit !"


: Jean-Baptiste est la voix de celui qui crie dans le désert. Le désert est le lieu des commencements dans la Bible. Je voudrais vous lire pour finir ce texte  :




"Une voix crie dans le désert"… Dans le désert de nos vies soi-disant "connectées", où l'on écoute pour répondre et pas pour comprendre, et si nous prenions le temps de nous arrêter, le temps du silence pour écouter en nous cette voix qui veut se faire entendre ?

Ecouter pour nous laisser convertir, pour nous laisser retourner de l'intérieur. En effet, comment construire un monde nouveau si nous n'écoutons pas la clameur de celui-ci, mais aussi le murmure de Celui qui vient, déjà, au cœur de chacun-e ?

Ecouter, accueillir, dire "me voici !", partager et changer en profondeur. Voilà peut-être notre chemin d'Avent. "  


(…Et un geste concret, déjà : la collecte de l'Avent pour tous les projets de lutte contre la pauvreté que soutient l'Action Vivre Ensemble.)



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