COMMEMORATION DE L’ARMISTICE 2024

 


Alors que le monde connaît des bouleversements tels qu’il n’en a jamais connus, et que certains disent qu’on est peut-être au bord d’une troisième guerre mondiale, nous allons commémorer-célébrer un Armistice.  

C’est quoi, un armistice (mot masculin : on dit signer un armistice) ? D’après le dictionnaire, c’est une convention conclue entre des belligérants afin de suspendre les hostilités. Si on prend le mot dans son sens exact, donc, un armistice suspend les hostilités, mais ne les supprime pas, n’en change pas la nature, seulement les effets, les combats militaires sur le terrain. D’ailleurs, l’Armistice du 11 novembre 1918 qui avait été assimilé à une victoire pour les alliés d’alors contre l’Allemagne, cet Armistice n’a pas fait long feu puisque le 1er septembre 1939, par l’envahissement de la Pologne par les troupes d’Hitler, puis par l’Union Soviétique, tout allait recommencer.

Les conflits armés, en principe, s’arrêtent un jour – il faut bien que les armes se taisent, ne serait-ce que par épuisement mutuel. Quelquefois, cela se solde par la victoire d’un camp sur l’autre ; d’autres fois, comme c’est le cas lors d’un armistice, par des concessions d’un des belligérants, des compensations territoriales, financières, ou en matières premières, etc. que le moins fort est bien obligé d’accepter. Cependant, si les canons se sont tus ça et là, si la folie destructrice qu’entraîne l’agressivité humaine et la volonté de puissance des dirigeants semble parfois s’éloigner, est-ce que pour autant la guerre est finie ?  Est-ce que l’humanité ne vit pas, n’est pas en état de guerre permanente – des conflits qui ne disent pas leur nom ?

On peut bien sûr évoquer la période de la « guerre froide » : n’était-ce pas une vraie guerre pourtant, avec moins de morts, certes, mais avec des manœuvres géostratégiques et des surenchères militaro-nucléaires qui font penser à un jeu d’échecs à la dimension du globe. Et puis il y a la guerre commerciale, les guerres économiques et pas seulement territoriales… En fait, chers amis, la guerre n’a jamais cessé. Et cela peut-être depuis la ‘guerre du feu’, dans la lointaine préhistoire. Tout au plus y a-t-il eu des périodes de relatif équilibre, mais qui immédiatement était sapé, remis en question par ceux qui voulaient plus de pouvoir, plus d’argent, plus de gloire. Et il y en a toujours eu. Combien de fois les peuples se sont-ils laissés abuser par ceux-là ! En fait, la guerre est d’abord l’art de manipuler les masses, de les conditionner par des idéologies et des discours mensongers pour qu’ils acceptent de se faire trouer la peau chez des gens qui n’ont rien demandé mais qui sont obligés de se défendre. Car bien sûr il y a aussi des guerres défensives, mais à quel moment, à quel stade finissent-elles par devenir offensives et une guerre de conquête ? Le conflit actuel d’Israël avec ses voisins pourrait servir d’exemple…


Non, chers amis, la guerre n’a jamais vraiment cessé. Elle change parfois de forme, tout simplement. Et, que nous le voulions ou non, si nous regardons bien le monde dans lequel nous vivons, nous devons constater que nous somme en état de guerre - et pas seulement aux Etats-Unis où les partisans de Trump et de Kamala Harris s’affrontent. Je ne sais pas quel monde nous allons laisser aux générations suivantes – je n’ai pas d’enfants, cela ne m’empêche pas d’être hanté par cette question. Je voudrais quand je rendrai mon dernier souffle ne pas devoir me dire : Qu’as-tu fait – ou pas fait – pour que les enfants du futur ne tombent pas dans un monde en guerre complète et totale ? (C’est ce que nous prédisent beaucoup d’observateurs et de scientifiques qui analysent l’état de la planète.)

Chute catastrophique de la biodiversité (99 % d’insectes pollinisateurs en moins dans certaines régions en l’espace d’une trentaine d’années !)…, dégradation de l’air, des océans, des rivières, des forêts, de la terre…, altération aujourd’hui irréversible du climat et catastrophes humanitaires dues au réchauffement climatique avec son corollaire de migration forcée des peuplades qui en sont victimes… Cela n’augure-t-il pas de futurs conflits, et même de guerres ouvertes pour s’approprier les dernières ressources de la Terre ? J’ai comme l’impression que c’est peut-être déjà commencé… On liquide des gens, des villages et des régions entières, au Congo, en Amazonie, dans certains pays d’Asie, pour s’emparer des richesses précieuses, des hydrocarbures, des terres rares dont nous avons besoin chez nous pour notre confort.

Je sais bien, chers amis, que vous n’y pouvez rien. Nous sommes embarqués, prisonniers dans des systèmes qui nous dépassent, dont les enjeux se jouent bien au-dessus de nous. Les élections aux Etats-Unis nous ont montré s’il le fallait combien les changements sont difficiles, face aux puissants lobbys financiers, industriels et commerciaux qui cadenassent la politique. La montée de l’extrême-droite un peu partout dans le monde et même chez nous, rend plus nécessaire que jamais de protéger la démocratie et l’éducation, face aux pouvoirs démesurés des faiseurs d’opinion qui manipulent les esprits et diffusent de fausses informations.

Le combat pour la Justice et pour la démocratie qui seul peut garantir une paix réelle, est un combat permanent et difficile. Mais nous devons tous nous y engager, quelles que soient nos croyances ou nos convictions philosophiques ou politiques. Sinon les sacrifices des générations qui nous ont précédées et qui ont enduré la guerre, ces sacrifices auraient été vains. Nous nous sommes rassemblés aujourd’hui dans cette église pour leur rendre hommage, mais aussi pour renouveler notre engagement à lutter pour une société, un monde juste et solidaire, respectueux des droits de toutes les femmes et de tous les hommes. Nous devons résister au rouleau compresseur d’une économie devenue folle qui obère les chances d’avenir de nos enfants. Refuser la violence et toujours privilégier le dialogue. Protéger les plus faibles et leur garantir le respect de leur dignité.

Souvent, le christianisme a été une force de résistance. Je parle du christianisme, pas des Eglises dont les jeux politiques ont parfois été ambigüs avec le pouvoir. La foi chrétienne est une force de résistance quand elle s’inspire directement de l’Evangile. Au nom de cette foi, de nombreux chrétiens sont morts martyrs en ayant eu le courage de résister aux puissances impériales depuis l’époque romaine jusqu’à encore aujourd’hui dans les pays communistes ou capitalistes, et de s’opposer aux dictatures et aux systèmes qui réduisent l’humain à une variable économique ou à de la chair à canon, comme ces soldats nord-coréens envoyés sur le front ukrainien.

La communauté européenne que beaucoup de pays de l’Est entre autres nous envient, est née sur les cendres d’une guerre qui a fait entre 50 et 60 millions de morts ; elle s’est construite avant tout pour qu’ « il n’y ait plus jamais ça », et pour protéger les valeurs démocratiques de liberté et d’égalité, de respect des droits humains. Malgré ses limites institutionnelles qui la fragilisent, elle a joué son rôle jusqu’à présent. Aujourd’hui, de nombreux et nouveaux défis attendent notre pays, la Belgique, mais aussi l’Europe et le monde entier. Pour que nous remportions aussi la guerre pour la Fraternité : la fraternité universelle, celle qui désarme toutes les guerres.

J’invite maintenant tous ceux qui le désirent à se joindre à notre prière.


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