C DIM 22 - Préférer !
"Si quelqu'un vient à moi sans me préférer
à son père, sa mère, sa femme, ses enfants, ses frères et sœurs, et même à sa
propre vie, il ne peut pas être mon disciple."  
Préférer.
Un mot que les enfants
connaissent bien. Quand ils accompagnent leurs parents pour les achats de
fournitures scolaire, ou dans toute autre occasion, depuis tout petits, on leur
demande sans cesse : est-ce que tu préfères ce cartable, ou celui-là ?
Cette couleur ou cette autre ? Qu'est-ce que tu préfères, aller au cinéma ou
bien un tour de manège à la foire ? Et pour la nourriture : Qu'est-ce que tu
veux manger : tu préfères des crèpes ou des pâtes ce soir ?  
Et parfois, ce sont des choix
plus difficiles qu'on leur impose de faire : tu préfères aller chez maman ou
chez papa ? – quand ces derniers ne vivent plus ensemble.
C'est toujours douloureux de
choisir, quel que soit l'objet du choix, aussi bien pour un enfant
que pour un adulte, parce que choisir une des deux alternatives implique
normalement qu'on renonce à l'autre. Cela rend le choix difficile, parce
qu'on a le sentiment en même temps d'une perte. C'est la croix qu'évoque
la parole. Le choix est crucifiant.
Préférer, c'est choisir le
meilleur, le plus grand bien. Et qu'est-ce qui est le meilleur ?
Là est la vraie question ! La question la plus importante de notre vie. D'où,
l'appel à la sagesse dans le psaume de ce dimanche: "apprend-nous la vraie
mesure de nos jours, que nos cœurs pénètrent la sagesse".
Celui qui sait bien choisir, qui sait quel est le meilleur et qui oriente sa vie et ordonne ses priorités d'après, a trouvé la sagesse.
Alors, qu'est-ce qui est le meilleur ? Le meilleur du meilleur ? Savez-vous répondre à cette question ? …
Oui, Dieu.
Logiquement, c'est
Dieu. "Celui qui a Dieu a tout", disait Thérèse d'Avila. "Solo
Dios, basta !" Dieu suffit !
Mais préférer Dieu, le plus
grand bien, doit-il m'empêcher d'aimer mes proches, mon père, ma mère,
mon conjoint ou mes enfants, comme semble le dire Jésus ?
Non, bien sûr !  Jésus aimait profondément sa mère et ses proches parents, quand il a dû les quitter pour accomplir sa mission et marcher vers sa
croix. Quand il a dit à ses disciples qu'il ne boirait plus avec eux du fruit
de la vigne avant de les retrouver au Ciel, il n'a pas manqué d'amour pour eux.
Il a simplement tenu à les aimer jusqu'au bout : en donnant toute sa vie
au Père, en l'offrant pour nous, il nous a ouvert le chemin qui nous sauve. Le
seul chemin !
Mettre l'amour de Dieu au
sommet de nos préférences nous permet de les hiérarchiser positivement et
d'établir des priorités. Celui qui n'a pas de priorités dans sa vie et
dans ses choix, aime, oui, mais il aime mal ! Cela peut même être un amour
immature, captatif ou fait de chantage ou de séduction… à la limite même
parfois destructeur. 
Préférer le Christ remet chacun à sa juste place. Faire de ma famille, de mes proches, un absolu, c’est leur rendre un très mauvais service. Car l’autre n’est pas Dieu, fut-il mon conjoint, mon père, ma mère, ma sœur, mon enfant ! Aimer Dieu en premier, c’est placer chaque relation sous le signe de la vérité.
Aimer le Christ en premier, ce n’est pas aimer
les autres moins — c’est les aimer mieux : en vérité, sans mensonge ni
illusion,
en liberté, sans dépendance affective,
avec une force qui dépasse nos limites humaines.
C’est un amour qui désencombre, qui élargit le cœur, et qui permet à chacun d’exister dans la lumière de Dieu, non dans l’ombre de nos attentes.
Aimer Dieu en premier n’abolit pas l’amour humain, mais l’élève,
L’amour du Christ purifie les attachements affectifs. L’amour des proches, s’il est centré sur Dieu, devient plus vrai, plus libre,
plus fort. Les autres amours s’éclairent, se purifient et se fortifient lorsqu’ils sont
ordonnés à l’amour du Christ.
L’amour du prochain devient plus vrai quand il est enraciné dans l’amour de
Dieu, et non dans le besoin affectif et la peur de la perte.
Ne pas idolâtrer ses proches, c’est accepter leur
altérité, leur manque, leur non-réponse.
C’est renoncer à la fusion, au désir d’être leur tout ou de faire d’eux notre
tout. Nos proches ne sont plus des absolus, ni des moyens de nous combler, mais
des personnes confiées à notre amour et à notre liberté. 
Cela permet un amour juste, capable de dire « non » quand c’est nécessaire, de pardonner sans oublier, de prendre soin sans s’effacer. C’est un amour qui respecte la liberté de l’autre, qui ne cherche pas à le façonner à notre image, mais à l’aider à grandir dans sa vocation propre.
C’est aussi savoir aimer sans posséder, jusqu’à accepter de perdre la vie au lieu de vouloir la garder : Mettre Dieu, le Christ, au sommet des préférences, nous aide à aimer comme lui, de son amour. Se donner est le plus grand des bonheurs. Si nous savons nous donner à Dieu, nous savons aussi nous donner aux autres, à ceux qui nous sont chers, sans les accaparer pour nous. Et nous en sommes heureux, car en vivant ce "détachement" de nous-mêmes, nous recevons les autres et leur amour en retour comme un vrai cadeau.
Jésus ne cache pas que c'est difficile de
préférer Dieu, et de mettre en œuvre ces priorités dans sa vie. D'où, ces histoires de bâtisseur de tour et de roi qui part en guerre : c’est sans doute d'abord de
lui-même que Jésus parle, de sa mission. Il en prévoit la fin. Il a
choisi de renoncer à tout pour la mener à bien et pour accomplir la volonté de
son Père. Il déclare qu’il ira jusqu’au bout. C’est par amour de son Père du
ciel et de ses frères de la terre qu’il a renoncé à ce qui lui appartenait.
Pour être libre et détaché, pour écouter et libérer, pour guérir et pardonner,
pour relever et sauver. Les choix qu’il a faits vont à contre-courant des
valeurs du monde, mais la suite nous prouve que c'est un chemin de vie et de
résurrection ! 
Alors, si en cette nouvelle année pastorale, si je
rechoisissais mes priorités ; et si je décidais de mettre Dieu au sommet de mes
"préférences" ? 
Eh bien je peux commencer par m'asseoir pour "calculer la dépense" : qu'est-ce que cela peut me coûter de suivre Jésus ? Je n'ai pas envie de faire des renoncements... Mais si je fais entièrement confiance à Jésus, si je lui fais, comme dit sainte Thérèse de Lisieux, « un chèque en blanc sur ma vie » en lui donnant tout d’avance, je sais qu’il me montrera et me donnera en même temps à tout moment ce qui est le meilleur pour moi, ce que je préfère parce qu’Il l’a choisi.
 Comme le
répétait l’abbé Joseph Foguenne - son totem scout "Condor bien ici" : « Ce que je préfère, c’est ce qui
m’arrive. »
Alors, l'aventure risque de m'emmener très loin…
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