C DIM 26 - Soignons notre vue !
« Comment osez-vous ? Vous avez volé mes rêves et mon enfance avec vos paroles creuses », s’est exclamée la jeune Greta Thunberg au sommet des Nations Unies sur le climat, le 23 septembre 2019. « Les gens souffrent, ils meurent. Des écosystèmes entiers s’effondrent, nous sommes au début d’une extinction de masse, et tout ce dont vous parlez, c’est d’argent, et des contes de fées de croissance économique éternelle ? Comment osez-vous ? Nous ne vous pardonnerons jamais ! » (à réécouter en entier en cliquant sur la vidéo ci-dessus)
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Ne
trouvez-vous pas que ces mots très forts prononcés par la jeune fille de 16 ans
devant les dirigeants du monde rejoignent tout à fait les textes de la liturgie
de ce dimanche ? Amos qui parle de
la « bande de vautrés qui se frottent le ventre et qui ne se soucient
guère du désastre d’Israël », et surtout, le fameux Evangile de Lazare et
du riche…
Le fameux évangile de Lazare et du ‘mauvais’ riche… Où donc avez-vous lu qu’il était mauvais ? Ce sont les copistes et les imprimeurs qui ont ajouté cette épithète en titre de la parabole, alors qu’elle ne figure pas dans le texte. Jésus ne dit pas qu'il était mauvais :
Le problème du riche, c'est juste un problème
ophtalmologique
! L'homme, sans doute à cause de sa richesse mais pas uniquement à cause
d'elle, s'est progressivement fermé à l'autre, au pauvre Lazare. Il ne le
voit plus – alors que ce dernier est assis chaque jour devant sa porte. Il
s'est dit: « Je ne peux pas accueillir
toute la misère du monde : que les CPAS fassent leur boulot, moi je paye
des impôts pour cela ; et puis les pauvres sont pauvres parce qu’ils le
veulent bien, ce sont des feignants, ils n’ont qu’à travailler... »
Il n’a plus vu un homme devant lui, une personne
concrète avec sa souffrance, mais uniquement un problème social, une
anomalie dérangeante... C'est ainsi que se creusent des abîmes infranchissables
! On parle de fossé ou de fracture sociale, ... Et bien, ce fossé, cette distance, elle est d'abord dans notre cœur à chacun
: c'est celle que nous mettons entre nous et l'autre, en refusant de voir,
d'ouvrir les yeux...
Or, ce que Jésus nous dit par cette parabole, c'est
que celui qui a ce problème de vue,
eh bien la distance qu’il a mise entre le pauvre et lui, c’est entre Dieu et
lui qu’il l’a établie ! Quand notre vie s'est écoulée, l'abîme est devenu
infranchissable : plus de retour possible. Si je suis loin du pauvre, du petit,
je suis loin de Dieu !
Les images sur l'enfer ne
sont pas à prendre au pied de la lettre (je dis ça pour rassurer ceux qui
sentent déjà les flammes leur lécher les fesses) ; ces images font partie du
stock des représentations populaires employé à l'époque de Jésus pour dire la
souffrance d'être coupé de Dieu et des autres : c'est cela « l'enfer »,
c'est comme une soif inextinguible...
La parabole elle-même est empruntée à des histoires qui circulaient un peu partout comme des
fables de la Fontaine, et dont raffolait le public, des histoires où les riches
et les puissants étaient les perdants : on en rajoutait, c'était une sorte de revanche
populaire ! (comme les sculptures
sur les tympans des cathédrales du Moyen-âge où les artistes montraient les nobles et les riches en
train de bouillir dans des marmites que touillaient des diables ricanant avec
leurs fourches...).
Mais
comme toujours, Jésus va arranger la conclusion à sa sauce : "Quelqu'un
pourra bien ressusciter d'entre les morts : ils ne seront pas convaincus."
Voilà la clé de tout. C’est parce que le riche n’a vécu que pour la vie présente qu’il
est devenu ce qu’il est : matérialiste et égoïste, jouisseur (« il portait des vêtements de luxe et
faisait chaque jour des festins somptueux »), et surtout, surtout il
est devenu AVEUGLE à autre chose qu’à lui-même !
Croire en la Résurrection est donc essentiel. Sans
cela, le monde sera de plus en plus matérialiste, individualiste et égoïste,
donc invivable. C’est le message que Jésus veut nous faire comprendre
aujourd’hui.
Soignons donc bien notre vue, la vue du
cœur ! Et vivons, dès maintenant, en ressuscités, en ouvrant nos oreilles et notre
cœur à la Parole pour qu'elle nous transforme et nous aide à combler au moins un peu les distances avec tous
les Lazare qui sont à nos portes… aux portes de l'Europe, de ma maison, de mon cœur…
Question
: comment s’appelle le
riche ? L’homme riche est sans nom,
anonyme. Le pauvre, lui, porte un nom. Un beau nom d’ailleurs : El’azar, Dieu
aide, Dieu a secouru.
Eléazar, Dieu secours… à travers moi ?
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