C NOËL 2024 - Quel mis-terre !
Nous voilà
devant un grand mystère à méditer !
Le mystère
de la naissance en notre chair du Fils de Dieu, le Verbe éternel.
Quel
mystère ! 2000 ans que nous le méditons à Noël chaque année, et on n’a pas
fini de le comprendre, parfois de le déformer, de le déguiser…
Je voudrais
avec ce mot faire une faute d’orthographe (que les enseignants me pardonnent) : mis-terre , en deux mots
et un tiret. Mis sur terre. Mis sur terre venant du ciel, de Dieu, par Marie,
simple fille d’Israël - de cette terre.
La terre, c’est le monde bien sûr – on dit « mis au monde » quand un être humain naît.
Mais c’est
aussi ma terre, ma glaise, mon limon dont je suis fait. Comme Adam,
comme tous les hommes. C’est-à-dire mon humanité, mon histoire. C’est dans
cette terre-là que le Christ est mis-terre aujourd’hui : Dans ma pauvreté,
dans ma vie TELLE QU’ELLE EST – et non pas telle que je la voudrais,
comme disait un de mes confères. C’est MA TERRE : Lourde, pesante et
souvent aride. Fragile, et qui s’en va s’émiettant parfois… Jésus vient en
ma terre, en ma vie : aujourd’hui, chaque jour depuis mon baptême !
C’est ça aussi Noël. Une cohabitation. Un partage.
« Pour
un Dieu, quel abaissement ! », disait un vieux chant de Noël. Jésus est le grain de blé
tombé en terre, en ma terre. Mis-terre, Mis-en-terre comme il le sera
après sa mort sur la croix. Mais c’est pour m’élever, me faire germer, grandir
jusqu’à ma stature de fils, d’enfant de Dieu ! Mes misères, il les prend
sur lui, et il me donne à la place sa Vie, sa force de Ressuscité. Car c’est ça que
fait l’amour… et Dieu est Amour.
Oui mais, que
le Fils unique de Dieu soit venu sur terre, dans ce monde, qu’est-ce que ça
change ? Il y a toujours autant de guerres, de souffrances, de
maladies ; et la terre – la planète aussi elle est bien malade…
Bien sûr. Jésus
n’est pas venu tout transformer d’un coup de baguette magique. Sa puissance est
ailleurs, s’exerce différemment. Essayons de comprendre.
À la
maternité de la clinique, quand un enfant vient au monde, on sent une
atmosphère toute spéciale : avec cette nouvelle vie si faible et fragile
qui arrive, c’est l’avenir qui s’ouvre, la confiance en d’autres lendemains
meilleurs que ceux d’aujourd’hui. L’espérance renaît, et tout le monde, tout
l’entourage est capté, captivé par ce minuscule petit être qui a tant de
pouvoir : Par sa simple venue, sa simple existence il attire les cœurs, il
fait jaillir de chacun et d’abord des parents des sources d’amour dont
on ne savait pas qu’elles pussent exister à ce point : ces petits êtres
sont des sourciers (pas des sorciers) ! Quel mystère !
…Je vois un peu la même chose quand des enfants débarquent à la maison de repos au milieu des personnes âgées : les regards s’éclairent, les mains tremblantes se dressent pour une caresse, les sourires renaissent sur les visages. On dirait que chacun de ces aînés retrouve un peu de vie et d’espoir, au-delà des murs où ils attendent à longueur de journée sans but.
« Oui,
c’est très beau cela, Monsieur l'abbé, mais ce n’est pas ce qui va changer le
monde ! On sait bien que les enfants sont attendrissants, ce qui
n’empêche pas malheureusement que des millions d’entre eux sont maltraités,
oubliés, tués ou blessés dans des guerres, des abus, ou meurent de faim en
silence... »
Précisément. Justement: Le fait que le Christ, le Fils de Dieu s’est fait l’un d’eux, cela change
tout !
Il ne s’agit
plus de s’attendrir seulement sur ces petits êtres innocents, ou sur le
« petit Jésus de la crèche », bien mignon, mais de prendre la
mesure concrète de ce que signifie ce « mis-terre » en deux mots, mis
en terre : Désormais, parce que Dieu est venu en Jésus prendre sur lui
notre condition humaine avec sa faiblesse, ses souffrances, et jusqu’à la mort
même, l’humain est sacré, la vie est sacrée, même et surtout quand elle est
pauvre et fragile.
Le
mis-terre, c’est que le Tout-puissant est venu habiter dans le tout-impuissant,
le tout-fragile, le tout-incapable, le malade et le handicapé ; le Verbe,
la Parole de Dieu est venue habiter dans l’in-fans, celui qui ne sait pas
parler ; le Seigneur des Univers dans le pauvre, le misérable, l’exploité…
C’est un renversement total ! Et depuis ce moment, on n’a plus le
droit de faire la guerre, car nous sommes tous les enfants du même Dieu en
Jésus, nous sommes tout frères ! Dieu nous supplie depuis la crèche
et depuis la croix : « Laisse-toi aimer ! Laisse-toi aimer par
moi, toi aussi tu es mon fils, ma fille en qui je mets tout mon
amour ! »
Evidemment tout le monde ne l’entend pas de cette oreille, et il y a encore bien des résistances face à l’amour de Dieu, des rejets – aussi en nous-mêmes, souvent, et cela continue d’entraîner du malheur et de la tristesse dans le monde et chez nous… Le monde serait tellement meilleur, et on se battrait pour les vraies causes, pour supprimer la souffrance et les injustices… pour que les petits et les handicapés soient à la première place, pour rendre à chacun sa dignité, et guérir la terre de tous ses poisons.
Il suffirait
de dire « oui » à Dieu. Comme Marie. En disant oui...la PAIX, l’AMOUR grandit dans
le monde aujourd'hui...car c'est à la manière de Dieu, de SON projet...IL NE
renonce jamais mais OUVRE À TOUT MOMENT DE NOUVEAUX CHEMINS DE MISÉRICORDE ET
D’EPERANCE pour nous, nos familles et le monde. Il suffit d’ouvrir son cœur, de
ne pas se refermer sur soi-même.
Tous ceux qui disent OUI, toutes les petites communautés, les petits groupes, les familles...qui prient et disent OUI sont les lumières dans le monde d'aujourd'hui... Vous pouvez, nous pouvons tous en être. Le pape François, en déclarant cette année 2025 une année sainte de Jubilé, nous invite à devenir des pèlerins d’espérance, en accueillant cet amour divin, ce ‘’mis-terre’’ infini.
Seigneur, aujourd’hui devant ta crèche où je contemple ce petit bébé entre ses parents qui te représente, je veux te dire « oui ». J’accepte ton amour, et je te demande de m’aider à croire en l’avenir que tu prépares pour toute l’humanité : c’est bien dans notre terre, notre fragilité qu’est semée la semence de la Vie, celle que ton Christ a apportée en venant dans notre chair. Fais de moi, de nous tous, des témoins de ce mis-terre. Amen !
p.s. Ceci dit, j'ai quand même eu droit à mon petit miracle de Noël cette année: Alors que je célébrais la messe le 24 décembre à la chapelle de la Clinique de Malmedy devant une douzaine de personnes, j'avais quand même fait laisser les portes ouvertes sur le couloir et installer quelques chaises devant la porte (on ne sait jamais...). Voilà qu'après le chant d'entrée "Douce nuit" je vois arriver à l'extérieur dans le couloir un jeune couple portant un minuscule bébé, un nouveau-né enveloppé d'une couverture ; ils s'assoient dans le couloir et suivent toute la messe par l'ouverture de la porte vitrée - visiblement, ils sont émus ! Et moi aussi... On n'avait pas de crèche à la clinique, et voilà que Marie, Joseph et Jésus débarquent ! 👨👩👧 (J'ai oublié de dire que la chapelle est au même étage que le service de la maternité). Il va sans dire qu'à la fin, je leur ai fait présenter leur petit trésor à l'assemblée, pour les féliciter de la naissance, les remercier de ce cadeau de leur présence - et bénir ce petit Jacob et ses parents 🙏. N'est-ce pas un super cadeau ? 🙅♂️
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