B PENTECÔTE 2001 - Extinction des feux ?
Dimanche 23 mai 2021
Pentecôte
Allons-nous vers une extinction
(des feux, du christianisme, de l’espèce humaine ?................ou vers
une naissance ?
Je voyais tantôt un documentaire qui parlait des nombreuses espèces
animales en voie de disparition ou carrément éteintes. De là ma question :
sommes-nous en danger d’extinction ? …Pour moi, cela dépend de notre
capacité de passer de la Loi à l’Esprit.
Je m’explique.
La pandémie du coronavirus a multiplié les règles et les lois
contraignantes. Tout le monde, toute la société en a été marquée… Même dans les
églises on a vu fleurir les panneaux et les pictogrammes imposant tel
comportement ou interdisant tel autre !
Chacun s’est soumis de plus ou moins bonne grâce, devant un intérêt
supérieur : la préservation de la vie et de la santé des personnes fragiles.
Il n’empêche, il y avait longtemps que des règles aussi fortes
avaient été imposées à toute une population de façon aussi large et commune :
personne n’a été épargné, tout le monde était concerné ! Idem pour le
vaccin, même si le choix de l’accepter ou non revient finalement à l’individu.
=>On peut ne pas aimer la loi, on peut même ne pas y obéir en prenant
le risque d’être sanctionné, elle s’impose quand même.
Parce que la loi, c’est au fond ce qu’on a trouvé de mieux (ou de moins
pire) pour que l’espèce humaine ne se détruise pas elle-même , en se battant les
uns contre les autres, en écrasant les plus faibles, en captant les ressources
au profit des plus forts. Quand il n’y a plus de loi, c’est la « Loi de
la Jungle » qui règne, le chacun-pour-soi.
=>La loi est donc nécessaire, tant que l’homme reste un loup pour
l’homme… Elle donne un cadre acceptable et reconnu par tous (la majorité) pour
vivre des relations équilibrées.
Ou, comme c’est le cas actuellement, quand un danger menace la
collectivité, danger qu’il n’est possible de conjurer qu’en
restreignant certaines libertés individuelles…
Eh bien, aujourd’hui, 50 jours après la Pâque juive, nos frères juifs
célèbrent Chavouôt : le don de la Thora, de la Loi
à Israël, quand Dieu a fait Alliance avec lui sur le mont Sinaï.
Cette fête est devenue pour les chrétiens la Pentecôte,
mot grec qui signifie « cinquantième ». Elle commémore la descente
de l’Esprit Saint sur les Apôtres, le 50ème jour
après Pâques.
Quel rapport entre les deux célébrations et les événements qu’ils
commémorent ?
=>Deux dons faits par Dieu aux hommes dans le cadre d’une Alliance : D’un côté la Loi ; de l’autre côté l’Esprit Saint. À priori, ces événements n’ont pas grand-chose à voir entre eux… ET POURTANT !!
-La loi, le peuple élu n’a jamais réussi à l’appliquer pleinement : malgré le Temple et ses prêtres, malgré la solennité du culte et les docteurs de la Loi, constamment, la Thora a été bafouée, sinon dans la lettre, du moins dans son esprit, car le fait d’observer scrupuleusement les commandements (en les détournant), n’empêchait pas les inégalités sociales, l’exploitation, la corruption et d’autres injustices (c’est d’ailleurs le grand reproche que Jésus faisait aux pharisiens).
Aussi des prophètes se sont sans cesse succédés
pour dénoncer ces abus et rappeler les engagements pris au Sinaï. On connaît le
cri célèbre d’Amos : « Je déteste vos pèlerinages, dit le
Seigneur, rien ne me plaît dans vos offrandes ! … Mais que le droit
jaillisse comme les eaux, et la justice comme un torrent » (Am 5,21).
Hélas les prophètes ont beau tonitruer, pointer les maux sociaux, appeler à la conversion, annoncer le jugement de Dieu, menacer de catastrophes : rien n’y fait ! On vénère la Loi, on l’étudie, on la commente,…mais on la bafoue jusqu’aux plus hautes sphères politiques et sacerdotales. Comme si quelque chose la rendait impraticable !
Il en va de même dans notre société dite évoluée et sécularisée : On ne croit plus en Dieu, mais il est toujours aussi compliqué de vivre des relations harmonieuses entre les humains. Les lois sont souvent détournées au profit de quelques-uns qui savent trouver les failles à l’aide de juristes véreux : l’exploitation, la discrimination, les inégalités sociales,…n’ont pas disparu, loin de là. La violence sociale, familiale, communautaire, non plus. Et même, on assiste à une véritable inflation des textes juridiques sans cesse remaniés, ce qui prouve que les lois peuvent facilement être détournées…
Cela ne rend pas la loi inutile, certes non, mais on voit bien
qu’elle n’est pas SUFFISANTE ! Il y
faut autre chose. Qu’il s’agisse de la Loi de Dieu ou de la loi humaine.
=>Ce quelque chose, c’est …l’Esprit !
L’ESPRIT-SAINT. Celui qu’avaient annoncé les prophètes Jérémie,
Ezéchiel, et que Jésus avait promis d’envoyer.
Sans l’Esprit, la Loi, toute loi (fût-elle religieuse)
est mortifère. =>Et on le voit
bien en ce moment, où une partie significative de la population ne supporte
plus les restrictions à la liberté individuelle, qu’elle ne comprend pas ou dont
elle ne partage plus le sens dans une perspective de bien commun - ce que
j’appellerais l’ « esprit », cet esprit qui était pourtant bien
présent au début de la pandémie, quand on applaudissait aux fenêtres les
soignants et qu’on appliquait sans discuter les recommandations des experts.
Au fur et à mesure que les confinements se sont succédés et prolongés,
les règles et les mesures se sont durcies ainsi que les sanctions pour leur
non-respect ; l’esprit avait cédé la place à la loi. C’est bien
dommage.
Ce qui est apparu très clairement lors des manifestations contestant les mesures imposées par les gouvernements, c’est que les manifestants dénoncaient précisément le fait que ces mesures briment les libertés que nous considérons comme fondamentales : liberté de circuler partout où on a envie, de sortir faire la fête, de manger au restaurant avec les gens qu’on aime, de fréquenter et d’embrasser ses proches, liberté de voyager à l’étranger, de pratiquer les loisirs et les sports que l’on veut, liberté de faire ses achats et son shopping comme on veut, d’aller boire des verres avec ses potes, d’aller au théâtre ou à la messe, etc etc. =>Mesures insupportables, parce qu’imposées d’en haut, sans concertation et sans tenir compte des situations particulières…
Aujourd’hui, heureusement, des assouplissements commencent à se mettre
en place, qui en même temps font appel à la responsabilité personnelle
(l’esprit)…
Il en est de même dans la vie chrétienne.
Pendant des décennies -voire plus-, avant le renouveau du Concile, on a eu
une religion de contraintes, d’obligations et d’interdits : le catéchisme
se résumait pratiquement à apprendre les commandements. C’était une religion
de la Loi, où la morale et une pratique religieuse sous la menace de la
sanction divine, pouvaient à la limite remplacer une véritable vie intérieure
d’amour avec le Seigneur et avec nos frères humains, une vie sous l’emprise de
l’Esprit Saint qui rend libre :
Or, il n’y a pas de comportement proprement évangélique, de morale
chrétienne, qui ne doive découler de la vie de l’Esprit en nous :
Frères, en vous laissant conduite par l’Esprit, vous n’êtes plus sujets de la Loi. Voici le fruit de l’Esprit : amour, joie, paix, patience, bonté, bienveillance, foi, douceur, maîtrise de soi : contre de telles choses il n’y a pas de loi…(Ga 5,18-23)
Donc, la Pentecôte vient en quelque sorte « corriger » l’incapacité de la Loi en l’animant de l’intérieur par le don de l’Esprit : Celui qui vit selon l’Esprit n’a plus vraiment besoin de ces garde-fous que sont les règles et les commandements, car de lui-même il va chercher et appliquer ce que l’Esprit lui suggère, qui est le meilleur selon Dieu.
Il ne se contentera pas de la lettre de la Loi, mais il la portera dans
sa plénitude de vérité et d’amour : Jésus l’a fait lui-même, qui n’a pas
aboli la Loi (pas un iota), mais l’a conduite à son achèvement, à sa perfection
en en faisant une Loi d’Amour. Et vous savez bien qu’on n’a jamais fini
d’aimer, et de grandir dans l’amour….
Si je vous ai parlé de tout cela, c’est parce que je pense profondément
que nous, les chrétiens d’aujourd’hui, mais aussi le monde entier, ce
monde où les plus forts imposent leur loi, nous avons besoin de vivre de
nouvelles Pentecôtes.
…Pour rendre les lois plus humaines, adoucir les relations, guérir les
cœurs blessés, redresser ce qui est faussé, abolir les injustices, rétablir la
vérité, seul l’Esprit Saint, l’Esprit d’Amour en est capable.
Mais si la Pentecôte est seulement un événement du passé, ou une simple
manifestation de mysticisme religieux comme beaucoup le considèrent, …comment
pourrions-nous recevoir aujourd’hui les dons de l’Esprit ?
En sommes-nous capables ?
Eh bien, je pense qu’il faut avant tout les désirer. L’Eglise
et le monde ont besoin que des hommes et des femmes de plus en plus nombreux
soient mus par l’Esprit du Christ, apportant leurs dons et charismes
particuliers à la construction de la communauté humaine et spirituelle de
demain.
Nous ne sommes pas tous pareils. Heureusement. Et c’est une richesse.
Mais nous pouvons tous essayer de passer du régime de la Loi à celui
de l’Amour, c-à-d de l’Esprit, en allant au-delà de ce qui est demandé
ou simplement honnête.
Je me souviens d’une chanson de Mannick qu’on utilisait souvent
pour les w-e de fiancés, et qui parlait de ces bateaux qui rouillaient et
clapotaient parce qu’ils étaient restés au port ou faisaient du cabotage: Peut-être
n’avons-nous jamais eu l’audace de tendre notre voile à la bourrasque de
l’Esprit, par peur d’être entraînés sur des chemins inconnus… La foi – mais
aussi la vie humaine, est toujours une aventure.
Demandons à l’Esprit de Pentecôte d’ouvrir nos possibles, afin
qu’ensemble, en communauté, en Eglise, nous osions le large !
Amen !
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