C DIM 27 - Augmente en nous la foi

 


Et voilà ! À peine les apôtres ont-ils été engagés par Jésus qu’ils demandent déjà une augmentation !

Je précise : une augmentation de la foi.

C'est certainement pour améliorer leur performance. Les apôtres se sentent appelés à réaliser des choses qui les dépassent et ils pensent qu'ils n'en ont pas la force.

 

Du coup, ils demandent : " Seigneur, augmente en nous la foi ! ", et c'est un peu comme s’ils disaient : "Seigneur, fais couler dans nos veines un peu de ce produit dopant si efficace qui te fait réaliser des prodiges."

Mais ça ne marche pas comme ça ! La foi n'est pas un produit. La foi ne se divise pas, pas plus qu'elle ne se multiplie. La foi, on ne peut pas la saisir. La foi ne tient pas dans la main. On ne peut pas la mettre en bouteille. La foi se reçoit, ok, c'est un don qui atteint notre esprit et notre cœur, qui nous traverse, qui nous donne comme un élan. C'est une énergie qui se consomme sur l'instant mais qui ne peut pas se stocker comme l'électricité dans une pile. On reçoit ce dont on a besoin sur l'instant si on est suffisamment réceptif. Si on s’est aussi suffisamment entraîné, comme le rappelle Paul à son disciple Timothée : « Je te le rappelle, ravive le don gratuit de Dieu qui est en toi depuis que je t’ai imposé les mains. » (Tim 1,6)


 

La foi c’est un don, certes, mais il faut l’exercer, la muscler (on parle d’ailleurs d’ « athlètes de la foi ») – sinon elle risque de s’étioler voire de disparaître. Si vous ne bougez plus, vos muscles vont fondre…

Mais plutôt que d’aller chercher des analogies dans le monde du sport, je préfère aller voir du côté du jardinage – d’ailleurs, Jésus nous y encourage avec son histoire de graine de moutarde: "La foi, si vous en aviez gros comme une graine... (Lc 17,6)


C’est une image forte, évidemment ; on ne voit pas très bien l’intérêt d’aller planter des arbres dans la mer, mais cette mini-parabole est destinée à convaincre les apôtres et nous par conséquent que la foi vainc tous les obstacles – même ce qui nous paraît a priori insurmontable. Pas de façon magique, mais parce qu’elle nous donne les ressources spirituelles : la confiance, la persévérance, l’intelligence, la volonté, le courage pour aborder les difficultés, trouver des solutions et agir en faisant notre possible et en laissant le reste à Dieu. Le reste, c’est-à-dire l’essentiel. Et vous savez quoi ? Ça marche !

 

La foi n’agit pas sans nous, l’adage est toujours vrai : « aide-toi, le ciel t’aidera. » C’est d’ailleurs ce que semble souligner Jésus quand il dit : « De même, vous aussi, quand vous aurez exécuté tout ce qui vous a été ordonné, dites : ’’Nous sommes de simples serviteurs, nous n’avons fait que notre devoir’’. » (Lc 17,10). Le serviteur sait bien que ce n’est pas lui qui est important. Mais il doit faire son devoir de son mieux.

 

Je pense que dans le jardinage, c’est un peu la même chose : le jardinier aligne les plantations, il bine, il repique, il arrose… mais c’est la nature qui fait le principal, on est d’accord ? Par contre, si le jardinier laisse le jardin à l’abandon, il sera vite envahi par les mauvaises herbes et ne produira pas grand-chose…

J’aime cette comparaison jardinière, parce que depuis longtemps je sais que la foi, ça se cultive. On a bien un don au départ, quelque chose qui s’est éveillé en nous ; mais il a fallu en même temps le témoignage concret et l’exemple de nos parents puis de nos éducateurs – un peu comme des tuteurs pour la frêle plante qu’est la foi ; et puis, à l’âge où on prend des décisions, où on fait des choix, il a fallu -ou non- assumer soi-même et s’approprier de manière personnelle cet héritage – avec toutes les remises en question que cela suppose pour passer d’une foi d’enfant à une foi adulte. Cela ne va pas sans efforts. Sans crises parfois.


 

Or aujourd’hui, on a beaucoup de terrains en friche, soit parce que les parents ont négligé de témoigner de leur foi en la vivant devant leurs enfants, soit parce qu’eux-mêmes n’ont pas fait l’effort de mettre à jour leur foi en l’exerçant et en la cultivant. On a donc une, deux voire trois générations déjà incultes spirituellement.

J’ai oublié une chose essentielle : la foi n’est pas qu’une affaire personnelle, elle est aussi destinée à se vivre dans une communauté, qui la renforce et la nourrit en la partageant. Mais nous savons bien que nos communautés chrétiennes sont en souffrance et elles ont du mal à mettre en œuvre leur rôle de catalyseurs de vie de foi et de charité. Il faudrait un remède de cheval, je ne sais pas lequel… Même les groupes de partage de la Parole (ou Lectio divina) vivotent dans leur petit coin ; la grande masse s’en désintéresse… Or la foi a vraiment besoin du témoignage des uns et des autres pour grandir et s’affermir. Pour rester vivante, et faire vivre ceux qui la partagent.

 


Sans la foi, est-ce que vous sauriez vivre ? Moi pas. Bien sûr, il y a des moments où ça va, où tout est facile, ça baigne… Croire est alors presqu’une évidence. Mais quand on rencontre la souffrance, l’échec, la maladie... ce n’est plus si simple. On se raccroche comme on peut, et heureux celui qui sait tout remettre dans la prière, dans un acte d’abandon et de foi ! Il est comme une forteresse, dit la bible. Et s’il tient, il en sortira avec une foi plus forte. À cela les épreuves sont parfois utiles : elles exercent notre foi, la purifient et en font dans certain cas un tremplin pour une vie chrétienne plus intense et capable d’aider d’autres à traverser les écueils et les peines.

 

Avez-vous la foi ? Ai-je la foi ? Ne répondons pas trop vite à cette question. De toute façon, comme je le disais au début, la foi on ne la possède pas, on la reçoit. Mais nous sommes responsables de ce que nous avons reçu, comme le Petit Prince de Saint-Exupéry qui a compris qu’il était responsable de sa rose.  

Et Jésus n’enfonce-t-il pas le clou en identifiant le croyant à un serviteur qui, quand il a terminé son travail quotidien, se met en tenue pour servir son maître avec humilité et empressement : Une foi chrétienne bien comprise ne peut que déboucher sur le service et le don de soi, à l’image du Christ. Elle n’est pas faite pour être enfermée dans un coffre-fort (ce serait très mal comprendre l’expression « garder le dépôt de la foi »), mais pour être vécue au grand air de l’Evangile, nous pousser au large… vers la Vie avec un grand V !


 

Réfléchissons donc comment entretenir le don de la foi que le Christ met en nous. Quels moyens suis-je prêt à utiliser ? La participation à l’Eucharistie en est un, mais cela suffit-il ?

 

Vous connaissez la célèbre publicité pour une boisson énergisante en canette bleue qui « donne des aiiiles » ?

Eh bien, s’il est encore (certainement) plus vrai que la Foi donne des ailes, je vous souhaite de vous envoler très, très haut ! « Semper altiorem ! »

 







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