A VEND-ST - "menacés de résurrection"

 C’est éprouvant d’écouter cette lecture de la Passion !

 

Le mot même « passion » nous fait même souvent peur, parce qu’il est synonyme de grande souffrance. Quand il s’agit de surcroît de la Passion du Christ, on voit défiler devant soi des images de couronne d’épines, de flagellation, de crucifixion, de torture et de mort. Et lorsque nous pensons, pour cause d’actualité ou par volonté de solidarité, à nos frères ukrainiens, du Moyen-Orient, ou d’autres contrées de notre monde, ce sont d’autres images encore qui nous étreignent le cœur, des images de l’horreur infligée à des victimes innocentes, des images chargées du poids insupportable de nos capacités toujours plus grandes de détruire et de donner la mort - quand ce n’est pas la nature qui s’en charge comme en Turquie et en Syrie….

Et on aimerait tant que ce soit déjà Pâques, on préférerait qu’on nous parle de lumière, de fête, de joie… Pas de cette horrible passion.

Le monde est déjà tant rempli de souffrances, de guerres, de violences, d’horreurs de toutes sortes. On peut avoir un peu de rêve ? un peu de répit, quoi !

 

C’est effectivement éprouvant d’écouter cette lecture de la Passion.

Mais que serait Pâques sans la Passion de Jésus ? Sans Vendredi Saint ? Une bulle qui éclate, nous laissant encore plus mortifiés, abattus, défaits le lendemain. Oh, on peut aller de bulle en bulle, comme nous y invite une société qui vend du rêve à consommer indéfiniment. Mais on est vite rattrapé par notre condition humaine et son quotidien si prosaïque et trivial...


Pour certains, leur ‘vendredi saint’ dure depuis des années, des années, et n’en finit pas…


Pourtant, quelqu’un a choisi la Passion.  La passion, ce n’est pas toujours la passivité, ce n’est pas qu’une situation que l’on subit, en étant à la merci des autres ou des évènements. Oui, c’est vrai,  Jésus a vécu cette dépendance totale, puisque les autres sont allés jusqu’à le condamner à mort, à le clouer sur la croix. Mais pour lui, cette Passion est la conséquence d’une vie pleine de passion -au sens actif. Jésus est passionné, passionné de Dieu, passionné de l’homme. Sa passion à lui, c’était d’abord de donner à chaque homme une nouvelle chance. Il disait à tous : vous pouvez vivre debout, solidaires, comme des frères. Vous êtes aimés de Dieu !


C’est cette passion qu’on a voulu arrêter en le mettant à mort. Mais en le faisant mourir, en le « passionnant », on lui a permis de venir visiter toutes nos passions, nos vendredis saints à nous, qu’il est venu illuminer de sa présence. Sa paix et sa lumière de Ressuscité. Il est désormais à côté de nous, sur tous nos lits de douleurs, dans toutes nos nuits d’abandon et de désespoir…

Chers amis, vous avez bien compris que nous sommes rassemblés pour faire mémoire de la mort de Jésus, mais aussi pour nous renouveler dans l’esprit de Jésus, pour essayer de vivre la même passion d’amour que lui.


Dimanche passé, nous avons célébré « les Rameaux » En fait, les rameaux, cela ne se fête pas : on les reçoit. Nous les avons reçus comme un signe que nous mettons dans nos maisons, afin que tout ce qui y est vécu soit ainsi exposé à la vie et à la passion du Christ : la vie de ceux que nous aimons, la vie de ceux qui nous ont quittés, la vie de ceux que nous n’aimons plus ; toutes nos histoires humaines qui se récapitulent dans cette histoire où Dieu a pris la condition humaine et l’a assumée « jusqu’au bout ». C’est pour cela que nous appelons cette semaine, « la Sainte », parce qu’elle donne un sens aux 51 autres semaines de notre quotidien.

Pâques sans la Passion, ce serait se tromper de bonheur : Jésus ne promet pas un bonheur facile. Si l’on prend son chemin, un chemin d’amour passionné, tôt ou tard il nous faudra rencontrer la croix.

Mais la Passion sans Pâques, ce serait se complaire dans la douleur. Ce ne sont pas les souffrances du Christ qui nous sauvent, c’est l’AMOUR qu’elles révèlent, c’est lui qui nous sauve ! La croix du Christ n’est fierté pour nous que parce qu’il est le Ressuscité ! Son chemin ne s’arrête pas au Golgotha ! Nos vies, si douloureuses soient-elles parfois, si elles sont passionnées comme celles du Christ, sont aussi des chemins de résurrection, des chemins de vie !

Un confrère prêtre, le Père Fournier, lorsqu’on était dans le temps du Covid, avait eu cette belle expression : « Nous sommes menacés de résurrection ! »

Je voudrais reprendre sa prière en l’actualisant, car elle peut nous aider à vivre cette Semaine Sainte près du cœur de Jésus :

 

Dieu notre Père nous sommes menacés !
Chaque jour, nous suivons les nouvelles,
celles des menaces et des méfaits de la violence, de la haine et de l’égoïsme destructeurs,
tous les blessés, les victimes, les familles en deuil, et ceux qui n’ont plus rien…

Dans la prière, nous Te les confions, tous nos frères souffrants.
Nous les confions particulièrement à ton Fils Jésus.

Le Jeudi saint, il s’est livré totalement, de tout son cœur et de tout son être, Corps et Sang, “pour nous et pour la multitude“.

Il était menacé de mort… et sa Passion l’a conduit dans nos souffrances, jusqu’au fond de nos épreuves. Il comprend si bien les nôtres – qu’il a lui-même ressenties !

Seigneur Jésus, nous célébrons ton Chemin de Croix: Tu portes toutes nos croix. Simon de Cyrène t’a aidé :
Nous Te confions tous ceux et celles qui travaillent pour préserver notre santé, ceux et celles qui aident les malades et les aînés à domicile, à l’hôpital, en maison de repos… Nous te confions tous ces passionnés qui savent le prix de la vie, qui sont généreux à se donner et qui luttent pour un monde plus respectueux de l’humain et de la Terre…

Ta Croix t’a plongé dans la mort jusqu’au fond du tombeau.
Ta Croix t’a fait descendre jusque dans nos peurs, dans nos enfermements, dans nos tombeaux,
et Tu es “descendu aux Enfers“, jusqu’auprès des défunts depuis le début de l’humanité !




Mais voici qu’au matin de Pâques, Alleluia ! près de Ton tombeau ouvert, Tu t’es manifesté ressuscité, Vivant, et rayonnant de lumière.
Alors, peu à peu, nous le découvrons :
avec Toi, si j’ose dire, nous sommes menacés de résurrection !


Dieu notre Père, que ton Esprit Saint soit Lumière pour nous , dans l’obscurité de cette traversée du désert qu’est souvent notre vie, avec cette Espérance :

: Que nous soyons conduits vers Ta lumière de Pâques ! Amen !

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