A DIM 26 - Zut !

 "Mon enfant, va travailler à ma vigne." Une histoire imagée, que Jésus nous conte pour nous inviter à réfléchir à nos engagements…

Et ce n’est pas sans me rappeler l’époque où mon papa boulanger me faisait lever à 3 heures et demie du matin, le dimanche, pour aller travailler avec lui à l’atelier – le dimanche, il n’y avait ni ouvrier ni apprenti. Evidemment, l’adolescent que j’étais n’était guère enthousiaste quand il fallait sortir du plumard bien chaud en pleine nuit ; n’empêche que je conserve de ces moments passés à travailler avec mon père un merveilleux souvenir – l’intimité partagée avec mon papa, les musiques que l’on fredonnait ensemble en écoutant la radio (la BRF germanophone), les commentaires et les histoires que l’on se racontait tout en travaillant aux petits pains et aux croissants…  Je n’ai jamais regretté ces instants qui m’ont aussi appris la valeur et la fierté du travail manuel.


 "Que pensez-vous de ceci? Quel est votre avis ?" La question de Jésus s'adresse bien à nous aujourd'hui. Comment réagissons-nous face à ces deux situations ?

Notre première réaction est de trouver bien grossier cet enfant qui dit "zut" à son père avec une telle désinvolture. Et puis, nous le trouvons sympatique: il change d'avis honnêtement et va accomplir la volonté de son père.

Jésus de donne pas d'explication : il constate le fait, c'est tout. Il nous montre quelqu'un qui "change", qui se "convertit". Et c'est déjà une révélation réconfortante pour nous. Les courants de pensée actuels tentent de nous faire croire que nous sommes conditionnés, enfermés dans des déterminismes qui nous poursuivent toute la vie: "Tu es le produit de ta famille, de ton éducation, de ton milieu et d'un tas d'influences; tu ne peux rien changer à ce que tu es".

Jésus, au contraire, nous ramène à notre responsabilité en nous répétant que les jeux ne sont jamais faits d'avance. Quel que soit notre passé, quels que soient nos refus précédents... un changement est toujours possible. Jésus est celui qui jamais n'enferme quelqu'un dans son passé.


Mais il y a le second fils... Et là, c'est une autre histoire. Il entend le même appel, la même invitation que le premier. Et parce qu'il est un "bon fils" ou qu'il veut se donner pour tel, il acquiesce, il obéit... mais ne fait rien d'autre que ce qu'il a envie.

Ah, ce deuxième fils! Comme il nous ressemble souvent! Nous sommes pleins de bonne volonté; et en réalité, comme les pharisiens, nous ne savons pas vraiment comment on dit oui à Dieu. Il croyaient lui dire oui, en toute bonne foi, mais en réalité ils lui disaient non. Ils lui disaient non parce qu'ils refusaient de voir en Jésus le Fils de Dieu, la référence ultime de toute vie, celui sur qui notre agir et même nos pensées doivent se fondre. Si je dis oui à Dieu, si j'accepte de prendre Jésus pour la référence ultime de ma vie, qu'est-ce que ça implique?

Saint Paul nous l'explique dans la 1ère lecture: "Ayez les mêmes dispositions que l'on doit avoir dans le Christ Jésus: lui qui était dans la condition de Dieu, il n'a pas jugé bon de revendiquer son droit d'être traité à l'égal de Dieu; mais au contraire, il se dépouilla lui-même en prenant la condition de serviteur... Devenu semblable aux hommes, il s'est abaissé lui-même en devenant obéissant jusqu'à mourir."

Voilà, c'est cela dire oui à Dieu, et quelque part nous le savons très bien puisque nous en évitons soigneusement les conséquences. Le seul qui ait jamais obéi à Dieu, c'est Jésus. Mais son obéissance n'est pas une obéissance servile (le mot nous fait horreur) mais un oui d'amour qui est réponse au « oui d’amour » du Père qui lui donne tout.

Beaucoup d’hommes et de femmes, et nous en sommes peut être sans nous en rendre compte, continuent à vivre une religion de soumission aveugle et dépendante, sous le mode du ‘permis/défendu’ ou une obéissance servile. Or Dieu n’a que faire d’esclaves,  il veut devant lui des hommes et des femmes debout et libres. Pour que nous devenions capables, avec l’aide de Dieu, de prendre en main notre destinée et celle du monde.  

    


En fait, nous ne pouvons jamais dire oui à Dieu qu'en Jésus. Et pour cela, il nous faut reconnaître notre incapacité radicale d'aimer comme il aime, de dire oui au Père par nous-mêmes. C'est pourquoi Jésus peut affirmer cette phrase qui nous choque, mais finalement ce n'est que la vérité: "Les publicains et les prostituées vous précèdent dans le Royaume de Dieu."

Pour dire oui à Dieu, il faut commencer par voir qu'on est en train de lui dire non. Ce n'est pas facile de s'avouer cela. Un danger guette les meilleurs, ceux qui font des efforts comme les pharisiens: se croire tellement du côté de Dieu qu'on ne songe pas à se convertir, à changer.

Alors, il faut se faire publicain ou prostituée? Non, mais découvrir que nos oui sont partiels, conditionnels, manqués. Que nous sommes des pauvres en amour (comme dans la parabole de "l'enfant prodigue"). Quand on en prend conscience, on a quelque chance d'être le premier fils, celui du vrai oui.


 

Seigneur Jésus, tu m’as dit : « Va travailler à ma vigne… »  

J’ai répondu : « Oui » Mais j’avais tant de choses urgentes à faire…  

Je n’y suis pas allé.   Seigneur, guéris-moi…  Apprends-moi l’essentiel… 

Que mon « oui » soit enfin « oui » véritable. 

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