B ASCENSION - Peur de l'ascenseur ?
Chers amis, avez-vous la
phobie des ascenseurs ?
Selon une étude menée par l’OMS
en 2011, ce trouble toucherait 2,1 % de la population ! Si j’en parle
aujourd’hui, évidemment c’est parce qu’on fête aujourd’hui l’Ascension du
Christ – mais aussi parce que j’ai vécu une petite aventure il y a une
quinzaine de jours lors d’un séjour à la mer.
Dans l’immeuble à appartements où je logeais se trouvait un ascenseur de type assez ancien qui avait une particularité : lorsque la cabine arrivait à l’étage désiré, il ne fallait sous aucun prétexte toucher la porte avant que la cabine se soit tout-à-fait arrêtée, et, surtout, que le mécanisme de la porte fasse entendre un clic libérateur. Pas très au courant de cette particularité malgré un affichage en pictogrammes expliquant la manœuvre, il n’a pas fallu longtemps pour que, moi dedans, l’ascenseur se bloque, avec la cabine décalée par rapport au plancher de l’étage où je logeais. Aie aie aie ! Heureusement, appuyant sur le bouton de l’étage supérieur, la cabine a bien voulu repartir… cette fois. Plus de peur que de mal !
La veille de mon départ de la
location, est arrivée une dame avec son petit chien au moment où je rentrais
dans l’immeuble. Quelques mots aimables furent échangés à propos du temps qu’il
faisait, de l’origine de la vacancière (elle était française mais vivait au
Canada)… mais sans évoquer l’ascenseur ! Elle venait pour la première fois
à cet endroit. Partie rechercher ses bagages dans sa voiture, je vaquais à mes
occupations lorsque soudain, des coups se firent entendre provenant du palier :
Quelqu’un martelait avec ses poings la porte de l’ascenseur en appelant au
secours ! L’ascenseur était à nouveau bloqué, à moitié entre deux étages,
avec la dame au petit chien à l’intérieur – complètement paniquée.
Eperdue de gratitude, elle
nous remercia chaleureusement : « vous m’avez sauvée ! »
et jura de ne plus prendre cet ascenseur tant sa peur rétrospective était
encore grande.
Pourquoi je vous raconte
cela, frères et sœurs ? Parce que dans notre existence, il y a des « ascenseurs »
qu’il nous faut obligatoirement prendre, et ceux-là ne sont pas mécaniques. Ce
sont des ascenseurs spirituels.
Vous êtes bien tous d’accord que nous, les humains, nous sommes bien de la terre (nous en sommes issus et d’ailleurs, nous commençons notre vie à quatre pattes). Et, petit à petit, nous prenons conscience – ou nos parents nous font prendre conscience, qu’il faut nous élever, grandir. Grandir pas seulement en taille et en capacité, en intelligence, force… mais aussi en humanité. Devenir un homme ou une femme à part entière. Souvenez-vous du beau poème de Kipling : « Tu seras un homme, mon fils ».
Pas si facile ! Il y
a tellement de choses, matérielles et autres : l’avidité, le besoin de
dominer, d’être le meilleur, d’être admiré, de ne dépendre de personne…, qui
nous tirent vers le bas – la terre, plutôt que vers le haut – le ciel !...
C’est justement le propre de la religion – ou en tout cas de la spiritualité,
de chercher à élever notre âme, de faire grandir notre vie intérieure en la
mettant en relation avec Dieu, le Très-Haut :
Jésus, plus que quiconque, veut
nous élever vers son Père et notre Père, son Dieu et notre Dieu
Donc, cette ‘Ascension’ ou passage vers le Père, moi, je
la vois plus comme l’aboutissement d’une vie humaine totalement accomplie telle
que Dieu l’a voulue et projetée.
Mais n’est-ce pas mes sœurs et
frères, notre vocation à tous, de nous accomplir le mieux possible ou le
moins mal possible, en nous servant des « ascenseurs » que Dieu par
son Fils a mis à notre disposition ?
***
J’aime bien cette image des ascenseurs, car, lorsqu’on est monté dedans et qu’on a actionné le bouton, il n’y a plus rien à faire – qu’à attendre l’arrivée - évidemment si la cabine ne s’arrête pas en chemin. L’ascenseur fait tout seul le travail. Cependant, il y a ces deux conditions : 1° il faut monter dans l’ascenseur ; 2° et ensuite appuyer sur le bouton. Et puis bien sûr ne pas y gigoter comme un diable ce qui aurait pour conséquence infaillible de le bloquer !
Précisons tout de suite que s’il
y a un certain nombre de personnes qui acceptent de monter dans l’ascenseur
spirituel, il y en a parmi eux beaucoup qui négligent ou oublient de pousser
sur le bouton, ou qui se contentent des étages les plus bas – les moins hauts,
par paresse ou manque de conviction.
Alors, vous avez deviné ce
que sont ces « ascenseurs spirituels » ?
Le plus commun peut-être (mais pas le moins important, loin de là), c’est l’Eglise. L’Eglise où le Christ continue d’être présent par son Esprit et d’exercer son action salvatrice. Mais l’Eglise aussi en tant que communauté fraternelle où chacun et chacune est invité à participer à sa vie. Beaucoup y entrent, y sont baptisés, mais combien ne poussent pas sur le bouton start ?
Alors bien sûr on pourrait
citer les sacrements, tous les sacrements. Ils agissent par eux-mêmes pour nous
élever vers Dieu ; mais ils ne le font pas sans nous, sans notre
concours, notre acquiescement à ce que le Seigneur veut faire dans nos vies.
Ces sacrements sont un peu pourrait-on dire comme les « étages » dans
cette ascension spirituelle. Les sacrements, ce n’est pas mécanique, ce n’est
pas magique, ce sont des tremplins pour ‘bondir’ vers dieu, ou rebondir dans
notre vie de foi et de charité… si nous le voulons !
Je pourrais citer aussi bien
sûr la Bible, la Parole de Dieu méditée et nourrissant notre ascension ; la
prière et la contemplation ; l’action solidaire au milieu de nos frères
humains et avec eux ; etc. etc. Beaucoup d’ascenseurs sont à portée de
notre main. Mais contrairement à celui de la dame et de son chien, ces
ascenseurs spirituels s’adaptent à ceux qui les empruntent, et ils s’élargissent
de façon illimitée pour accueillir tous les usagers, aussi nombreux qu’ils
puissent être.
Voilà. Et vous, mes chers
frères et sœurs, quel est votre ascenseur préféré à vous? – je veux
dire pour « monter » au 7ème ciel ? Pour avoir la
Joie de Jésus, déjà en ce monde et puis dans l’autre bien sûr ? …Il ne
faut pas encombrer la cabine avec trop de bazar, hein !
Jésus, lui, n’a pas eu de
difficulté pour passer de la cave au grenier. Il n’avait pas de pierre où
reposer sa tête, ni d’autres éléments encombrants dont il aurait eu à se
délester. Je me suis toujours demandé s’il était arrivé là-haut avec sa
tunique, ses sandales et le reste de ce qu’il portait au jour de son Ascension.
Probablement pas. Mais il est bien monté avec d’autres choses. Au minimum, ceux
qu’il avait croisés sur les chemins : la pécheresse, l’aveugle, les lépreux,
Jaïre et sa fille, et bien sûr sa maman et les 12 (oui, même Judas qui a
sans doute compris qu’il s’était trompé d’ascenseur !). Jésus n’a de cesse de tirer
vers lui comme hier tous ceux qui sont coincés, sans rêve d’ascenseur, jusque
dans les enfers mêmes – et il les fait monter au milieu des chants de joie vers
le Père qui les attend avec ses bras grands ouverts !
Nous non plus, nous ne
monterons pas seuls : Emmenons avec nous tous ceux que nous avons aimés,
et même ceux que nous aimons moins ou n’aimons pas. Nous monterons avec nos
larmes, nos espoirs déçus, nos lenteurs et nos pauvretés… Comme Jésus a gardé
les traces de sa crucifixion après sa résurrection, nous porterons aussi les
traces de notre passage sur la terre, mais transfigurées comme celles du
Christ. Comme l’écrit si bien le poète Charles Péguy :
« Les chemins de la terre ne peuvent pas garder plusieurs couches de traces. Nos pas les effacent.
Mais les chemins du ciel gardent éternellement toutes couches de traces. Toutes traces de pas. […] Et il y a des larmes d’amour qui dureront plus longtemps que les étoiles du ciel. »
Charles Péguy, « Le porche
du mystère de la deuxième vertu »
Alors, vous avez toujours
peur de prendre l’ascenseur ? Je vous invite à y monter pour l’Eucharistie… "Elevons notre coeur !"
Commentaires
Enregistrer un commentaire