A AVENT 4 - Signe ou pas signe ?

SIGNE ou PAS SIGNE ? - LE SONGE DE JOSEPH

Nous sommes à quelques jours de Noël, de la fête de la Nativité du Sauveur. Ce temps de l’Avent que nous continuons à vivre nous est donné pour suivre les pas de Joseph et de Marie en développant une oreille attentive aux signes de la présence de Dieu dans le monde et dans nos vies. Mais savons-nous les voir ? ...et y répondre en nous mettant en action ?


La 1ère lecture raconte l’histoire de la perte de foi d’Achaz en Dieu. Descendant du roi David, Achaz fut le premier roi de Juda à pousser sa méchanceté jusqu'à sacrifier ses propres enfants aux idoles (2 Rois 16.3).


Le Livre des Rois raconte que « le roi Retsîn de Syrie vint avec Péqah, fils de Remalia et roi d'Israël, pour attaquer Jérusalem. On informa Achaz et sa cour que les Syriens avaient établi leur camp sur le territoire d’ Ephraïm. Le roi et son peuple furent secoués par cette nouvelle comme les arbres de la forêt par le vent.

Imaginez la situation. Vous êtes un royaume faible. Deux royaumes s'unissent pour vous déclarer la guerre. Chacun d'eux, séparément, est plus fort que vous. Que faire ?

Le monde du roi Achaz s'effondre. A qui pouvait-il faire confiance ? Il n’a plus d’allié. Achaz se trouve alors à un carrefour de sa vie : allait-il commencer à faire confiance à Dieu, ou attendre son salut d’une autre puissance ?

Les difficultés politiques et militaires sont pour Dieu l’occasion pour tenter de détourner le roi de sa folie débridée. Esaïe est envoyé à Achaz pour lui apporter un message d'espoir et le supplier de se confier dans la puissance de Dieu. Il lui dit : « Demande un signe au Seigneur ton Dieu ». Achaz répond : « Non, je n’en demanderai pas. »


L’orgueil d’Achaz se cache derrière une fausse humilité : « Je ne veux pas mettre le Seigneur à l’épreuve ». En fait, cela équivaut à dire : « Je ne veux pas de ton aide ; je m’en sortirai bien tout seul ou en trouvant des moyens humains autour de moi. » La foi et l’orgueil ne font pas bon ménage ensemble.

Mais malgré ce refus et cette obstination d’Achaz, Isaïe décide de lui donner quand même un signe, celui que Dieu lui-même a choisi :

« Voici que la jeune fille est enceinte, elle enfantera un fils qu’on appellera « Dieu-avec-nous ».

Autrement dit, Dieu est du côté de la vie. Quel plus beau signe d’espoir qu’une promesse de naissance ? Au cœur des plus lourdes épreuves, dans tous les peuples et sur tous les continents, au milieu des guerres et des catastrophes, la naissance d’un enfant a toujours été vue comme la plus belle des promesses d’avenir.

La tradition fera le lien avec la naissance bien des siècles plus tard d’un autre enfant, Jésus, dont Marie a reçu l’annonce dans l’Evangile de Luc.  Pour elle comme pour Joseph, cette annonce imprévue est un signe.

Un signe par rapport auquel il a fallu se situer. Le refuser, c’est fermer la porte à un futur qui dérange, à l’inconnu ; c’est se replier sur soi-même et ses certitudes, vouloir garder le contrôle…

L’accepter, c’est permettre que sa vie soit bouleversée, transformée. C’est ouvrir des possibles là où il n’y en avait pas auparavant. C’est vouloir prendre son bâton de pèlerin et son baluchon et partir, se mettre en marche vers un futur dont on ne connaît pas les contours mais qui est dans les mains d’un autre, les mains de Dieu.

Joseph, dont il est question dans l’Evangile d’aujourd’hui, a dû faire ce « saut de la foi ». Lorsqu’il se rend compte que Marie est enceinte, il est un peu perdu ; d’un côté il a confiance en Marie qu’il aime sincèrement, de l’autre, il sait très bien que l’enfant qu’elle porte ne vient pas de lui. L’Evangile n’explique pas quelles ont été ses pensées, mais il nous dit le plus important : que Joseph cherche à faire ce qui est juste aux yeux de Dieu, même à renoncer à Marie, son amour pour la préserver. C’est un choix déchirant.

Mais alors Dieu par son ange l’invite dans un songe à faire confiance au signe qu’est la venue de cet enfant (remarquez d’ailleurs, c’est dans les rêves, souvent, que nos débats et dilemmes intérieurs trouvent leur résolution…).

On a beaucoup insisté sur le oui de Marie. N’oublions pas que le oui de Joseph est lui aussi indispensable pour l’accomplissement de l’Incarnation. Il vient en second mais il n’est pas moins essentiel car il donne à Jésus une famille, un nom.

Dieu nous veut vraiment partie prenante, non pas des marionnettes. Il n’attend pas de nous un consentement passif (oui ben je veux bien, on verra…) mais un consentement actif : « Ne crains pas, prends Marie chez toi. » C’est un engagement total et à long terme. Il veut que nous soyons vraiment acteurs de notre vie, parce qu’il nous respecte profondément comme il a respecté Joseph. Joseph a cru au signe qui lui était adressé, « Il fit ce que l’ange lui avait prescrit » et il a pris chez lui Marie.

C’est bref et direct. Plus d’hésitation. C’est pour cela que j’aime bien Joseph et que je le prie de temps en temps pour m’aider à prendre les bonnes décisions. Il n’est pas le vieillard que l’on représente parfois, mais un jeune homme plein de vie, de tendresse et foi, et qui cherche toujours à s’ajuster à ce que Dieu lui demande au cœur des événements. Il est dit de lui que c’est un homme juste, ajusté.

  

Le mot retenu pour cette 4ème et dernière semaine de l’Avent est donc le mot : « SIGNE ».

Bien chers frères et sœurs, croyez-vous aux signes ? En avez-vous déjà reçu ? Et surtout, faites-vous confiance aux signes – les signes de Dieu ?

Dans l’entrée ou dans le chœur de notre église, il y a une crèche. Cette crèche, elle est là, elle existe pour nous faire signe, pour rappeler cet événement vieux de plus de 2000 ans qui est la naissance de Jésus à Bethléem et qui fur signe pour des millions, des millions de personnes tout au long de l’histoire, et continue aujourd’hui de faire signe pour ceux qui gardent les yeux ouverts.


Que dit ce signe ? Il dit que Dieu est avec nous, exactement comme du temps d’Achaz avec le signe de la jeune fille enceinte de l’Emmanuel.

Il dit que Dieu est avec nous dans la fragilité, dans la précarité, dans la pauvreté ; qu’il partage nos souffrances, nos peines et nos échecs, pour y mettre la douceur de sa tendresse et le courage de se mettre debout, de lutter avec et pour les autres…

Il dit que Dieu est avec nous dans ce monde de violence et de guerre comme actuellement en Ukraine et dans tant d’autres parties du monde ; avec nous pour apporter un germe d’espoir et de paix, pour rétablir la fraternité et l’amour…

Il dit que Dieu est avec nous dans la maladie, et la froideur de la nuit du désespoir et de la mort ; avec nous pour nous faire passer à la Vie dans l’abandon total entre les mains du Père…

La crèche, c’est un signe qui en dit long !  

Pour celui qui veut bien voir. Qui veut bien croire.

« Il ne vous suffit pas de fatiguer les hommes, il faut encore que vous fatiguiez mon Dieu ! » lançait Isaïe au roi mécréant Achaz.  


Je crois qu’on souffre tout plus ou moins d’une malformation de la vue : Plus quelque chose est évident et ordinaire, moins nous avons tendance à le voir comme un signe. Pourtant, je crois que le Seigneur nous en envoie continuellement. Mais où trouvons-nous essentiellement ces signes ?

On nous le dit par la bouche de saint Paul : Dans la Parole qui est contenue dans les Saintes Ecritures et qui est sensée amener les lecteurs ou auditeurs à « l’obéissance de la foi ». Matthieu confirme : « Tout cela est arrivé pour que soit accomplie la parole du Seigneur prononcée par le prophète – et il cite la promesse d’Isaïe : « La Vierge concevra… »


Recevoir une parole de la Bible et l’accueillir comme un « signe » qui m’est adressé personnellement et qui m’invite à y répondre activement et librement, je pense que c’est vraiment le chemin de la Foi, celui que nous parcourons ensemble cet Avent avec notre bâton et notre baluchon qui contient peut-être déjà beaucoup de ces paroles, de ces signes que nous avons reçus en route.

Le signe de l’Emmanuel s’accomplit dans une mangeoire, nous rappelle l’Action Vivre Ensemble. Cela veut dire que Celui qui y est couché nourrira les foules affamées, et qu’il se donnera lui-même comme nourriture, nous invitant à faire de même en partageant les biens qui nourrissent la vie et qui appartiennent à tous. La mangeoire est donc un signe, celui du droit à l’alimentation pour tout humain : pensons-y en la contemplant en ces derniers jours de l’Avent. 

Et surtout, comme Joseph, agissons !

 

PRIERE : "Joseph de l'attente et de l'Avent"



Joseph de l'attente et de l'Avent, Père de toutes nos vigilances, Toi qui as donné un visage à notre avenir en accueillant Marie comme ton épouse, donne-nous d'être attentifs aux signes pour voir où Jésus est en train de naître dans le monde et dans l'Église.

Joseph de l'attente et de l'Avent, Toi qui as été capable de te faire nomade pour répondre aux appels de ton Dieu, apprends-nous à ne pas nous installer, à consentir, comme toi, dans la foi, à aller là où le Seigneur nous appelle.

Joseph de l'attente et de l'Avent, apprends-nous à nous ouvrir à la culture de la modernité et à celle de tous les peuples pour que nous soyons, comme Toi, des femmes capables de révéler à notre monde d'aujourd'hui des traces d'Évangile dans leur vie.

Joseph de l'attente et de l'Avent, avec Marie, apprenez-nous à enfanter Dieu, apprenez-nous Noël ! Amen. »

(Sœur Lise Berger)

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